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Des avancées médicales accessibles à tous : projet réel ou utopie ?

Les sciences de la vie et la biomédecine se développent à une vitesse toujours plus étonnante ces dernières années. Paradoxalement, les inégalités d’accès aux soins se creusent. Les pouvoirs publics, la communauté scientifique, les professionnels de la santé et toute l’industrie des soins ont la lourde responsabilité d’effacer ces contrastes, en imaginant un système de santé fondé sur l’équité. La situation est plus compliquée qu’elle n’y paraît. Toutes les parties doivent avant tout s’accorder sur le fait que le modèle de santé actuel est défaillant.

A-RECONNAITRE LES INEGALITES

Mais comment le prouver ? La mesure des inégalités d’accès aux soins repose à la fois sur une analyse statistique et sur des jugements de valeur. Sur l’analyse statistique, les données fournies par les organismes gouvernementaux et les réseaux de santé apportent la preuve irréfutable des disparités dans l’accès aux soins. En revanche, les jugements de valeur mènent rarement vers une conclusion qui fait consensus. Ces jugements dépendent en effet des préférences, des goûts et des sentiments de l’individu ou de la personne morale qui les énonce.

Les centres hospitaliers peuvent, par exemple, décréter qu’ils fonctionnent à plein régime et fournissent de ce fait un service de soin de qualité satisfaisant. En guise d’arguments, ils avancent le fait de traiter un grand nombre de patients, issus de couches sociales différentes. Forcément, un observateur indépendant peut douter de l’objectivité des centres hospitaliers sur ce point. Leur affirmation s’appuie en effet sur un jugement de valeur, basé sur l’impression ou le sentiment d’avoir soigné un grand nombre d’individus. Cette vision subjective ne reflète pas la réalité, mesurable seulement avec des données chiffrées et des indicateurs analytiques comparables.

B-DES SOLUTIONS ADAPTEES AUX MODELES DE SOCIETE

Un accès équitable aux avancées médicales est donc impossible sans une reconnaissance préalable des inégalités sociales qui prédominent dans le système de soins. Cette acceptation fait ensuite naître une volonté d’agir, motivée par une bonne compréhension des implications éthiques, légales et sociales du développement médical. Tout dépend ensuite de la trajectoire décidée par les pouvoirs publics, en tenant compte des valeurs de la société qu’ils défendent. Les solutions proposées par les dirigeants diffèrent ainsi selon le pays et son approche de l’institution « juste » et acceptable par tous.

L’égalitarisme libéral privilégie ainsi des solutions articulées autour de la liberté des individus et de valeurs universalistes. Une société utilitariste explore tout remède jugé utile à partir d’une analyse homogène des bénéfices, préférences, intérêts et souffrances qui lui sont associés. L’utilitarisme appliqué aux soins de santé est l’exact opposé du principe défendu par le philosophe Emmanuel Kant. La moralité kantienne se fonde sur le devoir et met l’accent sur la raison pratique.

Dans les conditions actuelles, garantir un accès équitable aux avancées médicales relève de l’utopie. Peu importe le modèle organisationnel décidé par les États et les autorités médicales, certaines catégories sociales continuent d’être marginalisées. Et cela ne découle pas toujours d’une erreur ou d’un manquement des leaders décisionnels. Les facteurs humains, des variables financières et des paramètres politiques ou économiques ne sont pas près de stopper cette injustice.

C-UNE RÉFLEXION PERMANENTE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ EN SOINS

Ces barrières ne doivent pas ralentir, ni brider les réflexions autour d’un modèle éthique en santé qui prône un accès équitable aux soins de base. Plusieurs pistes sont envisageables :

  • Soutenir la recherche et le développement de nouvelles pratiques médicales, en s’aidant de fonds publics

Sur le plan de l’éthique et de la logique, les travaux financés par des deniers publics ont vocation à servir l’intérêt collectif. Malheureusement, les grands laboratoires ont tendance à lever des fonds privés pour subventionner le développement de nouveaux produits ou procédés de traitement. La prééminence des investisseurs privés fausse le jeu.

Ces contributeurs escomptent évidemment des retours sur investissement, un facteur de rentabilité qui a une incidence certaine sur la distribution future des résultats de la recherche. Or, l’ajout d’un paramètre coût en amont alimente les inégalités d’accès aux soins. Les patients aux revenus précaires sont automatiquement lésés.

  • La réactivité des autorités législatives

Garant de la sécurité et du bien-être des citoyens, l’État a un rôle à jouer dans la distribution équitable des avancées médicales auprès de la population. Au-delà de ses implications éthiques, légales et sociales dans le développement médical, le pouvoir législatif peut voter des textes qui encadrent le financement des recherches. L’idée n’est pas d’interdire les financements privés, mais de fixer un seuil minimum pour le soutien public.

Cela demande de la réactivité de la part du législateur, une qualité pas toujours évidente connaissant la complexité du sujet. Le secret qui entoure certains projets de recherche complique d’ailleurs leur encadrement ou leur surveillance par les autorités.

Les considérations d’ordre éthique liées à l’inégalité des soins appellent une réflexion permanente et transparente de la part de tous les acteurs impliqués. Un débat public, honnête et sans jugements au préalable est la meilleure manière de saisir pleinement les implications éthiques, légales et sociales du développement médical d’un accès équitable aux soins.

Partie 4 – Les évolutions prévisibles dans le domaine de la santé

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