En matière de santé, les prises de décision interviennent presque quotidiennement à tous les niveaux. Les autorités et le législateur fixent des lois qui encadrent le financement des systèmes de santé ou définissent l’orientation éthique d’une politique nationale de santé. Les médecins, infirmiers et autres soignants décident aussi du protocole de soins à mettre en œuvre, en respectant un code de déontologie et en tenant compte des conditions de santé de l’individu. Le patient, lui, décide des soins qu’il accepte ou non, en fonction de ses croyances et de ses moyens financiers, entre autres influences.
Inévitable, la prise de décision demande une réflexion profonde sur les implications éthiques, légales et sociales de la santé. Ce questionnement éthique est d’autant plus important si la décision impacte potentiellement la santé d’une communauté ou d’une population dans son ensemble.
1. La prise de décision en santé publique
Une prise de décision en santé publique peut avoir des répercussions sur la vie de millions de gens. Un choix éclairé, basé sur des informations pertinentes et soutenu par des mesures d’accompagnement adéquates, permet d’avoir une population en bonne santé. À l’inverse, une décision irréfléchie mène parfois au désastre. Il suffit de voir les conséquences des prescriptions d’opioïdes aux États-Unis.
La crise des opioïdes a tué plus de 100 000 personnes aux États-Unis rien qu’en 2021. Le nombre de victimes dépasse 500 000 personnes depuis 90. À la base, cette catastrophe vient d’un manque de questionnement dans l’éthique organisationnelle de l’industrie pharmaceutique outre-Atlantique. Aux États-Unis, les laboratoires pharmaceutiques ont le droit de promouvoir des médicaments sur ordonnance, chose impossible en Europe. Le pays a fait le choix de privilégier la libéralisation de l’industrie pharmaceutique au détriment d’une approche de santé axée sur la solidarité, la prévention santé et le principe de précaution face aux produits de la recherche médicale.
Cette décision, dont on note le manque de conscience sociale et d’encadrement éthique, a favorisé les ventes de médicaments comme l’OxyContin entre 1995 et 2010. La situation dégénère et crée un énorme problème d’addiction qui touche différents groupes sociaux. Une meilleure considération des questions éthiques liées à la publicité sur les médicaments et la prescription d’antidouleurs aurait permis d’éviter, ou du moins, d’atténuer cette crise.
Ainsi, la prise de décision en santé publique exige nécessairement un débat éthique ouvert, franc et fondé sur des données intelligibles. Ces dernières doivent provenir de sources fiables et indépendantes – de préférence non reliées aux acteurs ayant des intérêts dans la prise de décision éthique. Bien sûr, ces échanges se tiennent dans un espace de réflexion neutre, doté de ressources documentaires suffisantes pour faciliter la prise de décision.
Dans l’idéal, les intervenants doivent avoir bénéficié d’une formation à l’éthique ou maîtriser toutes les implications éthiques, légales et sociales de la santé publique. La participation des représentants communautaires, d’un professeur d’éthique, d’experts en affaires sociales et des responsables de la santé publique est de rigueur. L’objectif de chaque intervenant consiste à trouver une décision éthique concernant la santé, l’amélioration des soins des populations et le perfectionnement des systèmes de santé.
2. La prise de décision en soins individuels
La prise de décision relative aux soins individuels est relativement simple. Conformément à la déontologie et à l’éthique médicale, le médecin respecte toujours le choix de chaque patient en matière de santé. Un soignant se doit de toujours faire preuve de tolérance, d’empathie et d’engagement envers chaque individu.
Loin d’être un simple observateur, le médecin s’assure de fournir en toute transparence les informations nécessaires à la prise de décision du patient. Quelles sont les particularités – avantages et risques – d’un traitement ? Qu’en est-il des questions de remboursement ? Comment se déroule le protocole de soins ? Pour certaines personnes, ces sujets renferment des implications éthiques, légales et sociales en matière de santé.
L’intervention du médecin se révèle particulièrement déterminante sur des thématiques de santé spécifiques, comme les soins palliatifs, l’accompagnement en fin de vie, les traitements novateurs associés à la génomique ou la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. Au-delà de son rôle de soignant, le médecin peut aussi conseiller et accompagner le patient – et ses proches – dans la prise de décision sur ces aspects de la santé.
Évidemment, ses actions ne doivent jamais dépasser les limites de l’éthique. C’est le cas lorsque le médecin adopte une posture paternaliste et interventionniste qui s’oppose naturellement aux principes de liberté et d’autonomie de l’éthique clinique. Pour qu’il y ait une égalité dans les soins, l’accompagnement du soignant dans la prise de décision doit être transparent, identique et élaboré selon une même démarche éthique.
Partie 4 – Du traitement des données personnelles confidentielles dans le domaine de la santé