La relation médecin-patient a toujours des répercussions sur la qualité des soins, ou du moins la perception de la qualité des soins par chaque individu. Dans les cas les plus extrêmes, ce déterminant social est aussi listé parmi les facteurs à l’origine des inégalités sociales de santé. Il est donc nécessaire d’en mesurer les implications éthiques, légales et sociales sur la santé, l’objectif étant de garantir la conformité de la relation médecin-patient avec la loi et avec le code de déontologie des soignants.
De manière générale, le personnel soignant poursuit un objectif unique, celui de garantir la santé de chaque individu d’une population, qu’il possède ou non la citoyenneté de son pays de résidence. Conscient de la valeur intrinsèque de la vie et de la santé humaine, le médecin s’assure d’entretenir une relation professionnelle avec son patient, qu’il considère à la fois comme un être éthique, doué de principe éthique, mais aussi un sujet à part entière et un organisme. Toutes les interactions ayant lieu dans une relation médecin-patient visent l’intérêt du patient, puisque l’activité médicale elle-même est pensée et articulée autour des besoins du patient.
Le médecin est tenu de respecter plusieurs valeurs et principes éthiques dans le cadre de sa relation avec un patient :
– Le droit à la vie
– L’intégrité physique et l’intégrité intellectuelle
– La vie privée et l’identité
– La primauté de l’intérêt du patient sur celui de la science et de la société
– Le droit de savoir et de ne pas savoir
– Le droit d’accéder à des soins de qualité, conformes aux normes en vigueur
– Le consentement éclairé
Ces principes donnent simplement une orientation éthique des interventions de santé d’un soignant sur un patient. Ces valeurs ne fixent pas de cadre rigide et uniformisé de la relation médecin-patient. Un praticien conserve une certaine liberté dans sa manière de concevoir et d’aborder ses liens avec un patient. La profession médicale reconnait quatre différents modèles de relation médecin-patient.
1- Le modèle informatif
Dans une relation médecin-patient de type informatif, le patient garde la majeure partie du pouvoir de décision. Le rôle du médecin consiste à fournir au patient toutes les informations pertinentes afin de l’aider à prendre une décision qui sert le mieux ses intérêts.
Le modèle informatif suppose que les intérêts et valeurs du patient sont établis, non pas par le médecin, mais par le patient lui-même. Le médecin adopte alors une approche de santé basée sur l’écoute, le conseil, l’accompagnement personnalisé, la compréhension de l’autre et la tolérance. Il n’interfère pas sur le choix du patient, tant qu’il contribue à la santé de l’individu et ne menace pas son intégrité physique et/ou intellectuelle.
2- Le modèle paternaliste
Ce modèle correspond au fonctionnement « traditionnel » du médecin. En tant que personne savante, le soignant se considère comme une personne dotée de capacités intellectuelles supérieures. Il s’arroge ainsi le droit de définir la meilleure stratégie pour améliorer l’état de santé et le bien-être du patient. Dans ce modèle, le médecin agit comme un expert, un guide chargé de promouvoir la santé du patient indépendamment de ses propres préférences. Il expose et décide ce qu’il y a de mieux pour son interlocuteur.
Ce type de relation n’efface pas pour autant l’autonomie du patient. Ce dernier peut toujours accepter ou refuser la mise en œuvre des soins présentés comme la meilleure stratégie par le médecin. Le soignant hérite malgré tout d’un plus grand pouvoir de décision. Ce déséquilibre relationnel soulève parfois des problèmes éthiques, notamment en cas de conflits ou de différences de points de vue à propos d’un traitement. Dans ce cas, le médecin doit s’en tenir au code d’éthique et respecter l’autonomie décisionnelle du patient, sans chercher à imposer sa vision par tous les moyens.
3- Le modèle délibératif
Cette relation médecin-patient ressemble un peu au modèle informatif. La seule différence se trouve dans le rôle décisionnel du soignant, qui est plus important. Dans un modèle délibératif, le médecin opère en tant qu’ami ou enseignant. Il engage le dialogue avec le patient et le sensibilise sur les implications éthiques, légales et sociales de ses choix en matière de santé.
Le médecin n’impose pas ses propres valeurs au patient. En revanche, il s’autorise de temps en temps à recommander un traitement, en tenant compte des valeurs et du niveau de compréhension du patient. La délibération entre médecin et patient implique un dialogue ouvert et une argumentation normative de la part du soignant.
4- Le modèle interprétatif
Le modèle interprétatif se rapproche également du modèle informatif. Dans cette relation, le médecin se doit d’aider le patient à mieux comprendre ses propres intérêts et ses valeurs. Par son rôle d’expert en médecine, le soignant expose également les conséquences possibles des interventions médicales sur la santé du patient, mais aussi sur ses valeurs et ses intérêts. À titre de conseiller, le médecin aide la personne malade à expliciter et hiérarchiser ses valeurs, sans chercher toutefois à prendre une quelconque décision à sa place. Cependant, sa relation éthique avec le patient le pousse à orienter plus activement le choix du patient.
Peu importe le modèle de la relation médecin-patient, le soignant a toujours l’obligation de considérer et de respecter les valeurs du patient. Ce dernier a toujours le dernier mot, sachant que le médecin est tenu d’obtenir son consentement éclairé avant d’administrer n’importe quel traitement. Enfin, le médecin agit aussi en fonction de la référence éthique du patient. Un modèle délibératif ou informatif convient mieux à une personne ayant suivi une formation universitaire ou très calée sur les enjeux du domaine éthique. En revanche, face à un patient issu d’une catégorie socio-économique moins privilégiée, le soignant peut être tenté d’adopter instinctivement un ton paternaliste.
Dans ce cas, le risque est de basculer dans une posture discriminatoire, dans laquelle les actions du médecin souffrent d’un biais causé par une appréciation erronée des capacités intellectuelles du patient. Pour ne pas tomber dans ce piège, les soignants ont tout intérêt à engager le discours éthique dès les premiers échanges avec le patient. Cela évite les erreurs de jugement et permet de connaître les valeurs et les positions du patient vis-à-vis des implications éthiques, légales et sociales de la santé.